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Le plan du RN pour gripper le Parlement européen

by editor

Que va faire le RN de tous ses nouveaux eurodéputés ? Le parti de Marine Le Pen devrait, si la tendance sondagière du moment se traduit dans les urnes le 9 juin, se retrouver avec des effectifs bien plus importants au Parlement européen qu’actuellement.

Mais cette poussée attendue ne suffira pas à renverser la coalition de fait qui règne à Strasbourg, constituée du Parti populaire européen (PPE), des Socialistes et Démocrates, et de Renew, le groupe centriste auquel appartiennent les eurodéputés macronistes.

De quoi s’interroger sur les objectifs que peuvent viser un RN renforcé et ses alliés, au sein de l’assemblée bruxello-strasbourgeoise.

Les dirigeants du parti, comme les stratèges de l’ombre, ne s’en cachent pas : l’idée n’est pas tant de construire une nouvelle force capable de diriger le Parlement que de constituer une “minorité de blocage”, selon les mots de Jordan Bardella, lors de ses vœux à la presse, le 15 janvier. Ou, dans ceux de Marine Le Pen, dix jours plus tard devant les journalistes, “des majorités de circonstance”, soit des alliances ponctuelles avec d’autres formations, destinées elles aussi à empêcher certains textes d’aboutir.

Un des plus proches conseillers de la présidente des députés RN traduit sa cheffe sans fioritures : “Les groupes [au Parlement européen], on s’en fout. C’est purement administratif […]. Ce qui est important, c’est les votes.” Un objectif renforcé depuis que les stratèges du RN ont constaté que le PPE pouvait les rejoindre dans leur opposition à la politique environnementale de l’UE. Le sujet, ils en sont convaincus, peut faire naître ces alliances de blocage.

D’après l’agrégateur de sondages de POLITICO, Identité et Démocratie (ID), le groupe dont sont membres les lepénistes, pourrait atteindre 89 sièges, contre 59 aujourd’hui. Il ne parviendrait ainsi à doubler ni le PPE (à qui appartiennent notamment Les Républicains) et ses potentiels 173 sièges, ni les Socialistes et Démocrates (141). Mais se placerait devant Renew, crédité de 79 élus dans un hémicycle qui comptera 720 sièges.

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Le RN a d’autres cibles dans son viseur : les voix du groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE, dont est notamment membre Frères d’Italie, le parti de la Première ministre italienne, Giorgia Meloni), qu’il espère rallier au gré des textes… à défaut de n’avoir jamais réussi à les convaincre de s’associer officiellement. Et que Fidesz, le parti du Premier ministre hongrois, Viktor Orban, envisage de rejoindre après les élections.

Les lepénistes n’écartent pas non plus la possibilité d’attirer parfois les suffrages du PPE, qui pourrait se laisser tenter par une droitisation.

Un angle anti-écolo

Le “cordon sanitaire”, en cours depuis que les lepénistes et leurs alliés siègent au Parlement européen, “vacille de plus en plus”, juge l’eurodéputée Marie-Pierre Vedrenne (Renew). En novembre, les élus européens se sont prononcés sur un volet clé du Pacte vert, destiné à encadrer l’usage des pesticides. Cette réglementation, retoquée en séance plénière, aurait pu recommencer son parcours en commission… si la droite et l’extrême droite n’avaient pas uni leurs voix pour empêcher cette révision. 

D’où le regain d’intérêt du RN pour le combat contre “l’écologie punitive”, à même, selon eux, de rallier les troupes de Manfred Weber, président du groupe PPE. “Les Allemands aiment bien leurs grosses voitures”, caricature le proche de Le Pen susmentionné, songeant à la nationalité la plus représentée au sein du groupe de droite.

Autres thèmes de potentielles oppositions communes identifiés par cet élu : contre l’élargissement de l’UE, contre l’extension du champ des compétences de l’Union, contre sa politique migratoire actuelle. 

Le parti à la flamme en est persuadé : ses positions séduisent de plus en plus le PPE, sous les pressions de l’opinion publique, à l’instar de celle exercée par la colère agricole. Et parce que le groupe ID devrait sortir renforcé du scrutin de juin. Voilà un point sur lequel la gauche les rejoint : “Le PPE a démontré sa porosité aux idées d’extrême droite”, attaquait Chloé Ridel, candidate socialiste, lors d’un point presse le 1er février. 

Dans l’esprit des frontistes, le blocage systématique sur certains thèmes identifiés est donc possible.

Et le programme dans tout ça ?

Loin d’être une priorité de la campagne du RN, un programme serait tout de même en préparation, selon plusieurs cadres du parti. La tête de liste, Jordan Bardella, devrait en dévoiler les principaux thèmes le 3 mars, lors de son premier meeting, à Marseille. Pour l’heure, seul transparait le plan d’une “Europe des nations” — encore vantée le 8 février par Marine Le Pen, dans Valeurs actuelles —, fondée sur des coopérations ponctuelles entre quelques Etats membres, comme du temps d’Airbus ou d’Ariane.

Autre avantage de cette stratégie des votes communs : faire oublier que le RN n’a, pour l’heure, jamais réussi à s’entendre avec l’autre groupe ultraconservateur du Parlement européen, CRE.

Leurs divergences quant à l’attitude à adopter face à la Russie sont revenues au premier plan depuis l’invasion de l’Ukraine. La proximité des nationalistes français avec Vladimir Poutine — encore dénoncée au début de l’année par le Washington Post — ou de l’Italien Matteo Salvini, opposé aux sanctions contre Moscou et lui aussi membre d’ID, font office de casus belli pour les CRE, plutôt tournés vers les Etats-Unis et leur parti républicain.

Avant d’accepter, la semaine dernière, le ralliement de l’eurodéputé zemmouriste Nicolas Bay, ancien RN, la direction des CRE l’avait d’ailleurs sondé sur sa position vis-à-vis de Moscou.

Avec cette logique d’une minimisation de la nécessité d’afficher un vaste groupe au profit de majorités de circonstance, le RN s’assure aussi de ne pas rompre totalement avec l’AfD allemande. Alors que Marine Le Pen a récemment pris ses distances avec ces alliés, ceux-ci pourraient ainsi continuer à marier leurs votes à ceux des frontistes… même s’ils étaient amenés à ne plus siéger ensemble.

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